Washington annonce la mort en Syrie du chef de l’Etat islamique
par Suleiman Al-Khalidi et Nandita Bose
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AMMAN/WASHINGTON (Reuters) – Le chef de l’Organisation de l’Etat islamique, Abou Ibrahim al-Hachimi al-Qourachi, a été tué jeudi par l’explosion de sa propre bombe lors d’une opération des forces spéciales américaines dans le nord-ouest de la Syrie, a déclaré la Maison blanche.
Le chef de l’EI a été « éliminé du champ de bataille », a annoncé le président américain Joe Biden dans un communiqué, précisant que tous les Américains étaient revenus sains et saufs de l’opération.
« Grâce à la bravoure de nos troupes, cet horrible dirigeant terroriste n’est plus », a ajouté Joe Biden devant la presse à la Maison blanche. Cette opération, a-t-il dit, « envoie un message fort aux terroristes du monde entier : Nous vous traquerons et nous vous trouverons. »
Abou Ibrahim al-Hachimi al-Qourachi, un Irakien âgé de 45 ans, avait succédé à la tête de l’organisation djihadiste à Abou Bakr al Baghdadi, mort dans des circonstances similaires en octobre 2019 lors d’un raid américain dans la même région.
Il avait joué, selon Joe Biden et les responsables de son administration, un « rôle moteur » dans le génocide commis contre la minorité yazidie dans le nord de l’Irak en 2014 et supervisait le réseau de « franchises » de l’EI de l’Afrique à l’Afghanistan.
Selon de hauts responsables de l’administration américaine, le nouveau « calife » de l’Etat islamique a déclenché une bombe qui l’a tué ainsi que plusieurs membres de sa famille, dont des femmes et des enfants, à l’intérieur de la maison où il se cachait dans un village proche de la frontière turque.
La bombe était si puissante que des corps ont été projetés à l’extérieur du bâtiment, ont ajouté ces hauts responsables, rejetant sur l’Etat islamique la responsabilité de toutes les victimes civiles, sans en préciser le nombre.
Des secouristes syriens ont déclaré qu’au moins 13 personnes dont six enfants et quatre femmes avaient été tuées dans des fusillades et explosions qui ont éclaté après le début de l’opération visant une maison de la localité d’Atmeh.
D’après des habitants d’Atmeh, l’opération s’est déroulée aux alentours de minuit dans une zone densément peuplée où des dizaines de milliers de Syriens déplacés par le conflit dans leur pays s’entassent dans des camps de fortune ou des habitations bondées.
UNE MISSION EN PRÉPARATION DEPUIS DÉBUT DÉCEMBRE
Selon ces témoignages et des sources parmi les rebelles, l’opération a débuté par l’arrivée de plusieurs hélicoptères qui ont atterri près d’Atmeh dans la province d’Idlib, dernière grande enclave tenue par les rebelles ayant pris les armes après le soulèvement d’une partie de la population syrienne contre le président Bachar al Assad en 2011.
Après le départ des hélicoptères à l’issue de l’opération, des avions de reconnaissance non identifiés ont continué à survoler la zone, ont dit des témoins.
D’après le récit fourni par les responsables américains, la mission des forces spéciales était en préparation depuis début décembre, quand la localisation du chef de l’EI a pu être confirmée, mais a été rendue difficile par le fait que le chef de l’EI ne quittait quasiment jamais le deuxième étage de la résidence, s’appuyant sur un réseau de messagers pour communiquer avec l’extérieur.
Outre Abou Ibrahim al-Hachimi al-Qourachi, un de ses lieutenants vivait également dans la maison où il s’est barricadé avec plusieurs membres de sa famille et a ouvert le feu, ainsi que son épouse, à l’approche des commandos américains. Tous deux ont été tués.
Après avoir envisagé un raid aérien, les Américains ont opté pour une opération commando pour tenter d’éviter la mort d’enfants et de familles habitant dans la résidence, dit-on à Washington.
Les procédures suivies par l’armée américaine pour éviter des victimes civiles font l’objet de contrôles accrus depuis que le Pentagone a reconnu avoir tué par erreur dix civils dont sept enfants lors d’une frappe de drone le 29 août dernier à Kaboul, la capitale afghane.
Joe Biden a finalement donné son feu vert à la mission mardi lors d’une réunion dans le bureau ovale de la Maison blanche, en présence du chef du Pentagone, Lloyd Austin, et du général Mark Milley, chef d’état-major interarmes. Tous trois ont assisté à l’opération en temps réel, ainsi que la vice-présidente Kamala Harris et le général Frank McKenzie, commandant des forces américaines pour le Moyen-Orient.
La province d’Idlib et une bande de territoire adjacente sont tenues pour l’essentiel par le Hayat Tahrir al Cham, anciennement appelé Front al Nosra, affilié à Al-Qaïda jusqu’en 2016. Plusieurs djihadistes étrangers de haut rang ont provoqué une scission au sein de ce groupe et créé un nouveau mouvement baptisé Houras al Din (les Gardiens de la religion), qui a été la cible ces dernières années de frappes aériennes de la coalition sous commandement américain.
(Avec Timour Azhari à Beyrouth, Susan Heavey, Trevor Hunnicutt, Phil Stewart, Steve Holland et Humeyra Pamuk à Washington; version française Camille Raynaud, Bertrand Boucey et Jean-Stéphane Brosse, édité par Blandine Hénault et Sophie Louet)