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Deux chrétiens survivent dans le califat de l’Etat islamique

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Lors de l’attaque de l’Etat islamique contre la ville chrétienne de Bartella, Jandark Benham Mansour (56 ans) et son fils Ismail Ibrahim Matti (16 ans) n’ont pas réussi à s’enfuir à temps. Ces deux chrétiens ont été emmenés à Mossoul, où ils étaient forcés de vivre comme des musulmans. Les bourreaux de l’Etat islamique les frappaient régulièrement pour des peccadilles.

Bartella est une ville chrétienne irakienne située dans la province de Ninive, à une vingtaine de kilomètres de Mossoul. Avant l’invasion de l’organisation terroriste État islamique (EI), au début du mois d’août 2014, elle comptait 30 000 habitants, principalement chrétiens chaldéens et syriaques orthodoxes.

Quand Jandark Benham Mansour (56 ans) et son fils Ismail Ibrahim Matti (16 ans) réalisent que la plupart des chrétiens ont déjà quitté la ville et qu’ils courent un grand danger en restant sur place, ils tentent en vain de fuir Bartella à pied pour se rendre à Erbil, dans la zone kurde. Mais les milices de l’Etat islamique les bloquent à un point de contrôle.

Ismail raconte le début de leur épopée douloureuse à John Eibner et Hélène Rey, deux responsables de l’organisation Solidarité Chrétienne Internationale : « Ils nous ont amenés à Mossoul et nous ont débarqués devant une maison inhabitée. » Après trois jours, des combattants de l’Etat islamique emmènent les deux captifs terrorisés dans une prison à Bartella. Ismail poursuit son récit :

« Sur place, un terroriste nous a demandé si nous ne voulions pas nous convertir à l’islam. Quand j’ai refusé, il m’a frappé violemment. Ensuite, les djihadistes m’ont contraint à venir dans la cellule voisine pour assister à l’exécution d’un chiite qui refusait de se convertir à l’islam sunnite. Ils m’ont menacé de subir le même sort. Il ne nous restait rien d’autre – à ma mère et à moi-même – que de répéter la confession de foi musulmane : La ilaha illa Allah wa Mouhammad rassoul Allah = ‘Il n’y a de Dieu qu’Allah et Mohammed est son prophète' ».

Dans les semaines qui suivent, Ismail et Jandark sont initiés à l’enseignement islamique avant d’être transférés à Shiraykhan, un quartier du nord-ouest de Mossoul. Mais leur manque de motivation pour apprendre des versets du Coran par cœur n’échappe pas aux terroristes de l’État islamique, qui les visitaient jusqu’à deux fois par jour :

« Ils me frappaient à chaque faute, et ma mère encore plus violemment ; ils lui plantaient même une longue aiguille dans la poitrine ou dans le dos. Se plonger dans l’étude du Coran répugnait vraiment à ma mère. »

Surveillés par l’État islamique

À Shiraykhan, Ismail et sa mère traversent une période douloureuse ; dans leur maison, ils n’ont ni eau ni électricité et ils n’ont pas le droit d’accueillir qui que ce soit. Le téléphone portable d’Ismail est même détruit par les sbires de l’État islamique. Certes, Ismail a la possibilité de se déplacer assez librement dans Mossoul – il trouve même un emploi d’informaticien à l’université de Mossoul – mais il se fait souvent fouetter par des terroristes de l’État islamique lorsque sa tenue vestimentaire ne leur convient pas. Mère et fils connaissent tous deux des angoisses mortelles et ils sont soulagés de pouvoir fuir, après sept mois, vers Bazwaia (périphérie est de Mossoul), grâce à l’aide d’un voisin.

Malheureusement, les combattants de l’État islamique, partout à l’affût, ont tôt fait de réaliser que ces nouveaux habitants sont des chrétiens, raison pour laquelle ils passent presque chaque jour chez eux. Un jour, ils découvrent des croix cachées près d’Ismail ; ils le battent violemment et lui demandent s’il les prend pour des imbéciles.

Comme ils ont à présent l’électricité, ils peuvent regarder la télévision. Une lueur d’espoir apparaît un jour, lorsque les deux otages apprennent, après deux années de captivité, que l’armée irakienne a reconquis Bartella ; cet espoir semble devoir se confirmer lorsque des combattants de l’État islamique toujours plus nombreux déposent les armes et désertent les combats. Beaucoup de personnes profitent effectivement du chaos ambiant pour s’enfuir. Mais une telle option reste toujours trop risquée pour Ismail et Jandark.

Fuite au cœur du combat

Les islamistes ont encore le contrôle de Bazwaia, et lorsqu’un combattant de l’État islamique reconnaît les deux « anciens chrétiens », il les saisit pour les transférer encore plus à l’ouest de Mossoul. À leur grande surprise, un djihadiste de l’État islamique leur indique alors une manière de se rendre dans une région passée sous le contrôle des soldats irakiens. Au cours d’un combat entre l’armée irakienne et l’État islamique, Ismail parvient à se faire remarquer par l’armée en hissant un drapeau blanc :

« Les terroristes de l’État islamique l’ont vu et ils nous ont tiré dessus. Mais nous avons pu rejoindre l’armée sans être touchés. Elle nous a alors conduits au camp de réfugiés de Khazer, à la frontière du Kurdistan. »

Concernant les expériences douloureuses qu’il a vécues à Mossoul, Ismail tient à témoigner que la plupart des habitants musulmans de cette ville étaient bien disposés à leur égard : « La plupart d’entre eux ne veulent rien avoir à faire avec l’État islamique. » Pour eux, il était aussi terrible que pour Ismail de devoir assister aux exécutions de l’État islamique :

« Un jour, nous avons vu comment des sbires de l’État islamique ont encerclé une femme accusée d’adultère : les combattants de l’État islamique lui ont expliqué sarcastiquement qu’elle pouvait avoir la vie sauve si elle parvenait à échapper à son encerclement, faute de quoi elle serait lapidée (ainsi était rendue la justice d’Allah). Elle a évidemment été lapidée. »

Ismail et Jandark sont très heureux d’avoir pu s’extirper des griffes de l’État islamique. Jandark se souvient : « Le pire, pour moi, c’est quand les terroristes torturaient mon fils sous mes yeux. Je suis heureuse de pouvoir de nouveau aller à l’église. » Leur avenir reste toutefois incertain et Ismail ne souhaite en aucun cas retourner à Bartella. Il préférerait rester à Erbil, tout en sachant qu’il ne peut pas y espérer grand-chose en matière de formation. D’un autre côté, sans passeports valables, il semble que l’émigration ne soit pas à leur portée.

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